La sélection végétale au siècle dernier, notamment sur les céréales à paille, s’est développée conjointement à un système agricole basé sur une spécialisation des productions et une standardisation des produits agricoles. Ainsi, les variétés de céréales ont été adaptées à un modèle agricole industriel, basé sur l’utilisation généralisée d’énergies fossiles (mécanisation, engrais azotés, produits phytosanitaires).
Un petit nombre de « lignées pures », très homogènes, et très proches génétiquement entre elles, ont dominé la production, entraînant progressivement l’adaptation du contexte de production avec des « béquilles chimiques » à un type de plantes standard, plutôt que l’adaptation des plantes au contexte climatique, éco-systémique, économique et social de chaque ferme.
Face à ce modèle, comme d’autres collectifs partout dans le monde, des paysans et paysannes de Rhône-Alpes ont décidé - au sein de l’ARDEAR Rhône-Alpes - de réintégrer la semence et le choix des variétés dans leur activité, pour retrouver des variétés adaptées à leurs pratiques.
Depuis 2005, ceux-ci ont remis en culture sur leurs fermes des variétés de pays locales et exotiques, pour trouver celles qui correspondent à leurs besoins (alimentation du bétail, transformation en pain à la ferme ou par des boulangers, transformation en pâtes alimentaires...), et renforcer leur autonomie semencière.
Les variétés paysannes favorisent l’autonomie car elles s’adaptent, au fil des générations aux pratiques des paysan·nes, aux terrains et évoluent en fonction des changements de conditions climatiques.
Il en résulte aujourd’hui un réseau décentralisé de préservation in situ des céréales de pays : une quarantaine de fermes entretiennent des parcelles de conservation de 1 à 10m2, multiplient, sélectionnent ou mélangent ensuite différentes variétés, pour les introduire dans leurs cultures de production. Cela représente environ 250 variétés de blé tendre, poulard, blé dur, amidonnier, orge, seigle, engrain, épeautre, avoine ; préservées désormais sur le terrain, dans les fermes.
Depuis 2005 également, l’ARDEAR participe activement au Réseau Semences Paysannes, pour mutualiser ce travail, échanger les savoir-faire, et défendre collectivement les droits des paysan-nes sur leur semences.
Certaines fermes de l’ARDEAR participent aussi à un programme de recherche collaborative avec d’autres membres du Réseau semences paysannes (RSP) et des équipe de recherche, en particulier l’équipe Diversité, Evolution et Adaptation des Populations de l’INRA du Moulon (91).
Pour diffuser les savoir-faire liés à ce travail, et les connaissances acquises autour de ces variétés, des visites de parcelles, des formations, et des journées d’échange de semences sont organisées. Les stocks de semences et les expérimentations sont uniquement sur les fermes, afin de ne pas déconnecter le travail sur les semences des échanges humains entre praticiens. Une animatrice de l’ARDEAR accompagne la dynamique du groupe en organisant chaque année la tournée des blés (visite des collections de blé), les rencontres des semis (temps de rencontre et bourse d’échange), des formations...
Si vous souhaitez vous impliquer, participer, poser des questions, vous pouvez prendre contact avec Léa Bernard.
– Brochure Notre blé est politique, issue du livre Notre pain est politique
– Brochure La baguette magique de l’agro-industrie, issue du livre Notre pain est politique
– Cultiver des blés paysans, reportage audio aux Rencontres des Semis